Abus de Pouvoir du Conseil Syndical : comment le prévenir ?

Les abus de pouvoir d’un conseil syndical de copropriété sont plutôt rares. Selon une étude de la CLCV [1], près de 62 % des copropriétaires interrogés estiment leurs conseillers syndicaux à l’écoute, tandis que 57 % d’entre eux les considèrent efficaces. Même s’il reste exceptionnel, l’abus d’autorité existe bel et bien. Dans ce domaine, mieux vaut prévenir que guérir, car les enjeux sont importants lorsqu’il s’agit de la gestion du patrimoine immobilier d’une part des 60 % [2] de ménages propriétaires en France. Ainsi, si vous êtes membre d’un conseil syndical ou copropriétaire, vous avez grand intérêt à vous protéger de toute situation abusive. Cet article s’adresse à vous : il répertorie les principaux facteurs de risque et dévoile les façons de s’en prémunir.

Abus de Pouvoir du Conseil Syndical : comment le prévenir ?
Crédit photo Elnur
Sommaire
  1. Comprendre la notion d’abus de pouvoir du conseil syndical
    1. Qu’entend-on par abus de pouvoir ?
    2. Quelle est la responsabilité du conseil syndical ?
  1. Identifier les risques d’abus de pouvoir du conseil syndical
    1. Le conseil syndical au cœur des rapports de force de la copropriété
    2. Cette mise à plat des forces en présence au sein d’une copropriété montre la disparité des statuts, des fonctions et des intérêts de chacun. Autant de freins possibles à un partenariat serein.
  1. La prévention des abus de pouvoir du conseil syndical
    1. Exploiter les garde-fous existants
    2. L’assemblée générale : la seule instance légitime
    3. Un compte bancaire spécifique à la copropriété.
    4. La formation des conseillers syndicaux
    5. La transparence et la communication

Comprendre la notion d’abus de pouvoir du conseil syndical

Avant-tout, mettons-nous d’accord sur le sens exact d’un abus de pouvoir.

Qu’entend-on par abus de pouvoir ?

Un abus de pouvoir du conseil syndical peut se définir comme un usage excessif de la position d’autorité d’un de ses membres, ayant pour conséquence une atteinte aux droits et aux intérêts d’un ou plusieurs autres copropriétaires.

Il est important de garder à l’esprit qu’un abus d’autorité peut tant découler d’un acte volontaire de malveillance que d’une erreur accidentelle due à un manque de connaissances ou d’expérience. Voici quelques exemples de situations rencontrés :

  • Failles sérieuses dans la mission de contrôle de la gestion du syndic ;
  • Dépenses interdites, non justifiées ou non validées par l’assemblée générale ;
  • Collusion avec le syndic[3] ;
  • Conflit d’intérêt avec une entreprise intervenant au sein de la copropriété ;
  • Décisions guidées par des affinités ou des griefs personnels envers d’autres propriétaires ;
  • Etc.

Quelle est la responsabilité du conseil syndical ?

Le conseil syndical n’est pas doté de la personnalité juridique. Par conséquent, en cas d’abus de pouvoir, sa responsabilité collective ne peut en aucun cas être engagée.

En revanche, chacun de ses membres peut être tenu pour responsable en cas de faute avérée. C’est pour cette raison que l’assurance de responsabilité civile est obligatoire pour les conseillers.

Au-delà de cette approche formelle, les responsabilités du conseil syndical sont importantes dans la mesure où son activité touche à des enjeux financiers et affectifs conséquents.

Identifier les risques d’abus de pouvoir du conseil syndical

Un éventuel abus de pouvoir du conseil syndical peut être mieux prévenu lorsqu’on en connaît les facteurs facilitants.

Le conseil syndical au cœur des rapports de force de la copropriété

La bonne gestion d’un habitat collectif implique différents acteurs interdépendants. Le niveau de risque d’abus de pouvoir dépend en partie de la qualité de leur collaboration.

Acteurs Statuts Rôles attendus Intérêts propres Finalité partagée
Propriétaires et locataires Habitants   Confort de l’habitat au quotidien Bonne gestion de la copropriété
Syndicat de copropriété Copropriétaires Élection de ses représentants / Suivi de l’activité du syndic et du conseil syndical / Présence aux AG* / Implication et volontariat Valorisation de leur bien immobilier et du patrimoine partagé
Syndic(non bénévole ou coopératif) Mandataire / Professionnel / Expert Gestion irréprochable du patrimoine commun Obtenir des mandats et les renouveler / Préserver une marge bénéficiaire entre sa rémunération et les moyens déployés
Entreprises Professionnels / Techniciens Services ou travaux au sein de la copropriété Assurer son activité et son chiffre d’affaires
Conseil syndical Copropriétaires / Élus / Bénévoles Défense des droits des copropriétaires / Relais d’information / Assistance et contrôle du syndic / consultation / Missions en fonction des délégations reçues par l’AG ou prévues au règlement intérieur Bonne gestion et valorisation de l’habitat commun

*AG = assemblée générale

Cette mise à plat des forces en présence au sein d’une copropriété montre la disparité des statuts, des fonctions et des intérêts de chacun. Autant de freins possibles à un partenariat serein.

Or, quand les rôles attendus ne sont pas endossés convenablement, c’est tout le système de contrôle qui s’étiole : des copropriétaires non impliqués laissent les coudées franches au syndic et au conseil syndical ; un conseil syndical trop frileux n’aura pas les moyens d’assurer sa mission de contrôle auprès du syndic, etc.

Une situation d’autant plus risquée lorsqu’on sait que les conseils syndicaux sont en moyenne composés de 2 ou 3 membres. Il arrive même que, faute de volontaires, certains présidents soient seuls à bord.

Chacun comprend alors que l’isolement, les contrôles insuffisants, le manque de collaboration, augmentent considérablement les risques d’une mauvaise utilisation de l’autorité.

La prévention des abus de pouvoir du conseil syndical

Maintenant que nous avons identifié les causes possibles des abus de pouvoir du conseil syndical, voyons quels sont les moyens existants et à créer pour les prévenir.

Exploiter les garde-fous existants

Le fonctionnement normal d’un conseil syndical, tel que voulu à l’origine par le législateur, comporte un certain nombre de garde-fous mis en place précisément pour éviter les dérapages.

L’assemblée générale : la seule instance légitime

L’assemblée générale est un précieux outil de prévention contre les abus d’autorité, à condition qu’elle soit massivement investie par des copropriétaires impliqués et attentifs.

C’est la seule instance légitime qui permet aux principaux concernés de contrôler tant la bonne gestion du syndic, que les missions déléguées au conseil syndical.

C’est également l’espace dédié au syndicat de copropriété pour élire ses représentants ou pour décider du renouvellement du mandat du syndic.

Autrement dit, l’assemblée générale est le moment idéal pour détecter et traiter tout risque d’abus de pouvoir.

Un compte bancaire spécifique à la copropriété.

La séparation stricte entre les comptes personnels et ceux de la copropriété est un élément important pour anticiper les abus de pouvoir d’origine financière.

La loi ALUR du 24 mars 2014 a renforcé l’obligation d’ouvrir un compte bancaire dédié.

Cette clause était déjà prévue par la loi historique du 10 juillet 1965, mais il était possible d’en être dispensé par simple vote de l’assemblée générale. Depuis le décret d’application de 2015, la dispense est désormais impossible pour les résidences de plus de 15 lots.

Il est du devoir du conseil syndical, mais aussi de chaque copropriétaire de s’assurer de la bonne application des outils de contrôle existants.

La formation des conseillers syndicaux

Une meilleure connaissance des rôles, de la législation et du fonctionnement d’une copropriété permet aux conseillers syndicaux d’éviter de nombreuses maladresses ou erreurs.

2 leviers paraissent particulièrement adaptés pour améliorer les compétences au service de la gestion d’un habitat collectif :

  • Le suivi de cycles de formation sur les différentes thématiques liées à la copropriété ;
  • La mise en place au sein du conseil syndical d’une veille sur l’actualité juridique et législative des résidences partagées ;
  • L’invitation d’un expert en rapport avec la thématique traitée lors d’une réunion de conseil syndical.

De nombreux organismes proposent des cycles de formation pour les conseillers syndicaux et les syndics bénévoles. Certaines sont gratuites, comme celle de la CLCV par exemple. N’hésitez pas à vous renseigner.

La transparence et la communication

Ne tournons pas autour du pot : le meilleur rempart contre toute forme d’abus de pouvoir réside dans le degré de transparence, de communication et de partage d’information que chaque conseil syndical parviendra à insuffler dans son fonctionnement. Là encore, des outils existent et n’attendent que d’être mis en œuvre :

  • Organiser régulièrement des réunions entre conseillers syndicaux pour favoriser les échanges au sein de l’instance. Celles-ci pourront participer à l’amélioration des bonnes pratiques en traitant des thématiques telles que : les diverses évolutions législatives, la préparation de la prochaine assemblée générale, l’actualité de la copropriété, etc.
  • Préparer les futures élections du conseil syndical afin d’encourager les volontaires et de se prémunir des candidatures qui pourraient potentiellement desservir le fonctionnement de l’instance.
  • Faire appel à un tiers médiateur en cas de litige ou de problème de collaboration avec un autre acteur.
  • S’appuyer sur des moyens de communication modernes, internes à la copropriété, comme ces applications de plus en plus utilisées pour distiller une information régulière à tous les copropriétaires. Vous imaginez à quel point un réseau social propre aux résidents et au conseil syndical pourrait faciliter la transparence et la communication ?

En somme, loin d’être une fatalité, le risque d’abus de pouvoir est aussi une formidable occasion d’interroger les pratiques en cours au sein de la copropriété, mais aussi d’améliorer la communication interne, grâce à de nouveaux outils collaboratifs adaptés et accessibles à tous les membres.

Cet article touche à sa fin, à présent, c’est à vous de jouer, vous avez toutes les cartes en main pour prévenir les abus d’autorité au sein de votre conseil syndical.


[1] Étude réalisée par la CLCV (Consommation Logement et Cadre de Vie), avril 2012 : https://www.clcv.org/storage/app/media/enquetes/Les-coproprietaires-et-leur-copropriete.pdf

[2] INSEE : https://www.insee.fr/fr/statistiques/4263935#titre-bloc-12

[3] Abus de pouvoir du syndic de copropriété

[4] Ministère de la Cohésion des territoires - Agence Nationale de l'Habitat - 31/03/2021

 
CGU et mentions légales V 1.42.3